Atelier Buissonnier

Porte des Maures

Quatre pour Quatre 7 Alhazen

La tuile !

Une chatte sur un toit brûlant
A pattes de velours voulut subitement
D'une pauvre colombe usée par un vol épuisant,
(Du Maghreb elle arrivait, migrant certainement),
En faire pour son midi un juste canapé reconstituant.
C'était sans compter sur la tuile brûlante
Bigrement chauffée par le soleil culminant
Voilà notre félidé, griffes et coussinets fumants,
Miauler de douleur et alerter le volatile sur l'instant.

 


La colombe lui dit de prendre du champ
Et de lui ficher la paix, (ce qui parait évident)
Sous peine de contrarier les dieux bienveillants
Du silence, elle troublait la sérénité reposante
Et tenait plutôt du barrissement d'un éléphant
Qui, dans un magasin de porcelaine, allait s'ébrouant.
Mais la bête poilue voulut passer outre en bondissant
Et à ce drôle d'oiseau voler dans les plumes finalement.
On vit dans un ciel d'été sans nuage, cela n'est pas fréquent,
Jaillir un éclair et déflagrer un tonnerre assourdissant
La chatte eut une peur bleue et devint blanche intégralement
Incapable de bouger et de miauler, figée dans un tableau saisissant
De Jupiter, les tuiles étaient romaines, plutôt que de Zeus tonnant
Cela était l'œuvre et le châtiment.
Ainsi notre chatte en porcelaine dorénavant
Se brûle désormais les pattes sans pouvoir faire un mouvement
Alors que sa fausse proie est là, juste devant !
La colombe, elle, s'envola et d'un brin d'olivier fit présent
A Minerve qui, des vices dans le jardin de la vertu, s'en allait chassant

Il faut se méfier d'une blanche colombe sans défense apparemment
On finit par en être le pigeon même en roucoulant.

Et c'est la "tuile" manifestement.

 


Tata Yoyo !

La mer roulait ses galets
Sur la plage abandonnée
Sea, Sex and Sun sur tous les rivages
L'amour à la plage faisait rage.

 

C'est le Sud, le soleil donne
Tata Yoyo fait sa matrone
Assise sur sa chaise où elle trône
Surveillant ses petites mignonnes.

 

Elle préfèrerait qu'elles fissent des châteaux de sable
Mais en elles, le blé en herbe sortait de l'étable
Il fallait bien être un peu charitable
Et les laisser ondoyer parmi les vagues aimables.

 

C'était sans compter sur ces jeunes éphèbes émoustillés
Qui en apnée, des callipyges déesses, les poitrines admiraient
Emportés par la déferlante qui les titillait
Ils s'invitèrent à partager cette belle et charmante amitié.

 

Elles minaudèrent, firent la chattemite, roulant des hanches
Ils insistèrent, voulant leur apprendre la planche
Ils les tiendraient d'une main secourable et franche
En attendant de la vague la stimulante avalanche.

 

La tantine vit de sa place le manège hardi
De ces coqs de basse-cour pas encore dégrossis
Et siffla les donzelles en leur criant "c'est midi!"
Elles sortirent de l'écume craignant pour leurs abattis.

 

Les jeunes, dépités, virent leurs conquêtes filer doux
Et s'habiller prestement cachant tous leurs atouts
Ils osèrent affronter la nonne, ils avaient du bagout,
Et demandèrent si demain, au bain, il y aurait rendez-vous.

 

Tata Yoyo, son pliant sous les bras, ouvrit son cabas
Et leur offrit une boite pour tartine qu'elle tenait là
Goûtez, c'est pour les piots cette chose-là
Primevère, ça guérit le printemps qui fleurit sous les bras

 

C'est aussi bon pour les peines de cœur et ses bouffées !
Le mer roulait ses galets
Sur la plage, une boite abandonnée,
Il suffit d'un grain de sable pour tout casser.

 


Un grain de sable !

Elle est bien seule la brave fontaine !
Inaugurée par le maire et la fanfare déchainée
Il avait dit "Que d'eau, que d'eau !" comme Mac Mahon sans le citer
Le curé l'avait bénie, pour son eau c'était une aubaine.

 

Elle coulait des jours heureux sous le soleil estival
Forte de quatre trous dont un au côté droit
Elle pissait dru, ce qui était primordial
Pour remplir un bidon au bouchon bien étroit.

 

Quand Manon y dégrafait son corsage
Pour caresser l'eau vive du bassin
Le galant lui s'y rinçait l'œil, le petit malin
Trouvant qu'à dessein, il fallait tisser des louanges.

 

On s'y rinça la dalle, les mains et même le gosier
On s'y fit rincer par des maris jaloux
Alors que la lune comptait les coups
On y rinça du linge et de la vaisselle, ce qui était gonflé !

 

L'eau de potable devint douteuse et finit imbuvable
Mais la fontaine continuait de couler avec assiduité
Avec parfois une mousse blanche improbable
Qui fit qu'on y lava son linge sale, ce qui est lamentable.

 

Puis vinrent les bains de mer et de soleil sur la plage
On adora la côte, on détesta le sable sur la peau
On abhorra le sel qui donnait des rides trop tôt
Et dans la fontaine on se baigna sans ambages.

 

Elle éructa, vibra, s'étouffa et finalement se tut
Un grain de sable élut domicile dans ses rouages
Et de la pompe de bronze et d'airain cessa tout usage
On cria au mauvais œil, à une farce, à un malotrus

 

Diablerie, un médecin des pompes fut mandé
Et diagnostiqua du sable dans l'airain
Il ordonna un long repos recommandé
Et de ne point s'y rincer au quotidien.

 

Depuis on n'y rince plus rien, c'est primordial
Ni la bouche, ni le linge, ni la dalle
Même pas l'œil de peur de se faire rincer
Tout ça pour un grain de sable qui s'est fait coincer !

 

 

Du balai !

Ô Pin d'Alep à la cime élégante
Qui chante dans le vent marin
Des refrains de cigales
Ton écorce ridée craque et desquame
Exhume des essences oubliées
Comme un vieux chant de barde attristé

 

Ô Pin d'Alep ton feuillage d'un vert discret
D'aiguilles rares et précieuses
D'où perle la goutte de résine
Quand l'été pèse de toute sa chappe de plomb
D'où te vient cette façon de perruque
Affichant le vert profond des forêts de mélèzes ?

 

Ah mon brave vous me voyez bien mal à l'aise
Il est de nous, pauvres sédentaires des côtes ventées,
Une malédiction qui l'on traîne depuis qu'Eve à croqué la pomme !
C'est dire qu'elle est affaire de magie bien noire
Un sort qui nous affecte, une maladie, que sais-je ?
Druides, sages et savants ont dit que cela était affaire de sorcière.

 

Je vois votre air ahuri, vous me voyez bien marri
Mais que voulez-vous c'est malheureusement ainsi !
D'un chancre, point mou, me poussent de multiples rameaux
Grêles et serrés pompant ma sève qui les engraisse
Petits mais nombreux, ils font plaisir à voir
Dans leur livrée de vert profond.

 

D'un champignon dans les jointures ils sont la fioriture
Bien calfeutrés dans mes vaisseaux malmenés
J'ai eu le malheur de lui dire en langage de pin
"Du balai ! Tu n'as rien à faire ici !"
Cela n'a fait que renforcer la chose et d'une sorcière
On m'attribue désormais ce balai.

 

Cela m'en bouche un coin !
Il conviendrait de chercher la sorcière
Il est vrai qu'elles ne courent plus les rues de nos jours
Peut-être à Halloween, faites un appel !
Sur son balai elle repartira à la lune levée
Et vous délivrera de ce sort bien curieux.

 


Publié le : Jeudi 02 décembre 2021 @ 21:53:09

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